Répertoire encyclopédique de photographie
comprenant par ordre alphabétique tout ce qui a paru et paraît en France et à l'étranger depuis la découverte, par Niepce et Daguerre, de l'art d'imprimer au moyen de la lumière, et les notions de chimie, physique et perspective qui s'y rapportent
Auteur(s) : LA BLANCHÈRE Henri de
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Nicéphore NIEPCE sera le premier à maîtriser le procédé photographique, mais c’est l’invention, par Louis DAGUERRE, d’un appareil fiable et transportable, qui va permettre le développement rapide d’une nouvelle technique qui ne cessera de se perfectionner durant les décennies suivantes. À ses débuts, la photographie nécessitait une série d’opérations parfois très complexes mais toujours méticuleuses. De ce fait, une certaine expertise était indispensable pour effectuer et fixer les prises de vue. Autre difficulté, financière celle-là, le coût d’un matériel encombrant et délicat à manier. Un nouveau métier est alors en train d’apparaître : celui de photographe.
Natif de La Flèche, Pierre René Marie Henri MOULIN du COUDRAY de LA BLANCHÈRE – qui raccourcit son patronyme, pour adopter comme nom de plume Henri de LA BLANCHÈRE – fait ses études à l’École forestière de Nancy et travaille dans l’Administration des eaux et forêts entre 1841 et 1848. À cette date, il part à Nantes suivre des études de chimie, tout en s’intéressant à la zoologie, en particulier à l’ichtyologie. Installé à Paris en 1855, il s’initie à la photographie auprès de Gustave LE GRAY, un des grands pionniers de cet art en France. Ce dernier, peintre de formation, ne tardera pas à se faire un nom grâce à des portraits de personnalités et des clichés sur le thème de la mer et des rivages.
Membre de plusieurs sociétés savantes et président de la Section de Photographie de la Société libre des Beaux-Arts, LA BLANCHÈRE se qualifie désormais de “peintre et photographe”. Prolifique, il écrit de multiples ouvrages d’histoire naturelle, parfois illustrés par ses photographies, dont plusieurs traitant de la pêche et de la pisciculture. Mais il n’oubliera jamais son autre grande passion, la photographie, à laquelle il consacre plusieurs ouvrages, comme L’Art du photographe, comprenant les procédés complets sur papier et sur glace, négatifs et positifs, Monographie du stéréoscope et des épreuves stéréoscopiques, ou encore La Photographie des commençants. Visiblement, il se sent investi d’une véritable mission : faire connaître et diffuser au plus large public possible la “matière photographique” en mettant l’accent sur les importantes avancées réalisées en une vingtaine d’années à peine car, écrit-il, “la science photographique ne marche pas, elle vole, elle éblouit par la rapidité de ses progrès”. C’est dans ce contexte qu’il s’attaque à la rédaction de celle qui sera une des premières grandes encyclopédies françaises consacrées au sujet, sous le nom de Répertoire encyclopédique de photographie. C’est cet ouvrage qui va faire l’objet de ce billet.
Bénéficiant de nombreux soutiens de sociétés et d’entreprises, il parvient à réunir une abondante documentation sur les appareils et les techniques les plus récents, en s’appuyant aussi bien sur des publications françaises que belges, anglaises, allemandes, italiennes et américaines. L’ouvrage, édité entre 1862 et 1866, comprend deux parties. La première, faite des deux premiers tomes, constitue un dictionnaire alphabétique classique abondamment illustré. Nous y trouvons “tout ce qui a été fait jusqu’ici et tout ce qu’il importe de savoir“, soit “le passé de la photographie”. Vendue à l’origine sous forme d’abonnements et de livraisons mensuelles, la deuxième section, qui s’étend sur quatre tomes, est composée d’une production périodique annuelle qui permet de coller à l’actualité et d’apporter “ce qui se fait dans ce domaine “. Notre exemplaire regroupe les six tomes en trois volumes reliés.
Pris par son sujet, LA BLANCHÈRE s’adresse visiblement à un lectorat déjà bien informé sur les techniques photographiques. Les définitions sont souvent pointues, parfois accompagnées de schémas, de démonstrations et de formules chimiques plutôt difficiles à appréhender pour le non-initié. L’ensemble, qui n’est donc pas d’accès facile pour un pur néophyte ou même un simple curieux, fait le point sur les progrès et les perspectives de la photographie. L’ouvrage permet aux professionnels et aux passionnés de faire un tour d’horizon de la discipline. L’auteur n’hésite pas à évoquer des projets encore au stade théorique ou en début de concrétisation. Il relaie aussi des débats en cours, comme celui-ci : “Plus que jamais on cherche à scruter l’incompréhensible mystère de la formation des images sur les couches sensibles. Les uns y voient une action chimique, les autres ne veulent y trouver qu’une action électromagnétique ou même purement matérielle, un ébranlement moléculaire. Quelle est la vérité ? L’avenir nous le dira”.
Après la publication de cet ouvrage, LA BLANCHÈRE semble s’être focalisé sur sa carrière de naturaliste. En 1868, il publie La pêche et les poissons, nouveau dictionnaire général des pêches, illustré par des dessins colorisés réalisés d’après ses propres clichés. Il décèdera au Havre en 1880.
Extraits
– Éclairage du modèle : § 1. Le grand écueil de la photographie, c’est qu’elle donne d’un seul coup une image complète : si donc, par la faute de l’opérateur, le modèle est défectueux, l’épreuve le sera forcément et sans remède. § 2. Pour avoir un modèle parfait, il faut disposer artistement ses lignes, c’est de la perspective ; il faut éclairer parfaitement ses reliefs, c’est là du dessin. Pour éclairer parfaitement, il faut disposer de moyens appropriés de varier l’incidence et la valeur de la lumière générale qui nous entoure. Tout cela ne peut guère s’obtenir que dans un endroit spécial, exposé au nord, vitré sur la plus grande partie au-dessus et par côté, et muni de rideaux se mouvant dans tous les sens. Mais quand on se borne au rôle d’amateur, cette installation n’est pas indispensable. Une chambre vaste et bien éclairée par une fenêtre AB au nord peut suffire. Il faut, dans ce cas, faire poser le modèle D de trois quarts en face de la fenêtre, et choisir un objectif C.
– Collodion négatif : Pour les portraits dont la figure vient trop vite, on agite devant la tête, et pendant les derniers moments de la pose, un écran de velours noir, monté à l’extrémité d’une petite tige noire en bois ; de cette façon, on donne aux habits le temps de venir à point, car la pose doit être plus longue pour eux, dans le rapport de 3 à 2 pour le visage.