Gravure (art), Bibliophilie

Manuel de l’amateur d’estampes

contenant: 1. Un dictionnaire des graveurs de toutes les nations dans lequel sont décrites les estampes rares, précieuses et intéressantes, avec l'indication de leurs différents états, et des prix auxquels ces Estampes ont été portées dans les ventes publiques, en France et à l'Etranger, depuis un siècle - 2. Un Répertoire des Estampes dont les auteurs ne sont connus que par des marques figurées - 3. Un dictionnaire des Monogrammes des Graveurs - 4. Une table des peintres, sculpteurs, architectes et dessinateurs d'après lesquels ont été gravées les estampes mentionnées dans l'ouvrage, avec renvoi aux artistes qui ont reproduit leurs œuvres - 5. Une table méthodique des estampes décrites dans le dictionnaire des graveurs et dans le répertoire. Et précédé de Considérations sur l'histoire de la gravure ; ses divers procédés, le choix des estampes, et la manière de les conserver.

Auteur(s) : LE BLANC Charles

 Paris, Émile BOUILLON éditeur, 67, rue de Richelieu
 nouvelle édition (la première date de 1854)
  1888-1890
 4 vol (2150 p. environ)
 In-octavo
 demi-chagrin noir à coins, dos à cinq nerfs, caissons et têtes ornées de motifs dorés
 reproductions de signatures et de monogrammes dans le texte


Plus d'informations sur cet ouvrage :

En 1810, Jacques-Charles BRUNET publie pour la première fois son fameux Manuel du libraire et de l’amateur de livres.  Cet imposant dictionnaire bibliographique sera réédité et augmenté à de multiples reprises, jusqu’à compter 40 000 titres et devenir, jusqu’à nos jours, la bible des bibliophiles. Cet ouvrage en est déjà à sa quatrième édition quand un dénommé Charles LE BLANC s’avise de réaliser un complément au “Brunet”, exclusivement consacré aux graveurs et aux gravures imprimées. Bibliothécaire employé au Département des estampes de la Bibliothèque impériale à Paris de 1839 à 1855, notre homme, spécialiste confirmé dans le domaine des estampes, est souvent requis pour son expertise dans les ventes publiques.

L’invention de l’imprimerie a sonné le glas des livres enluminés, mais elle a permis de multiplier les illustrations à un coût raisonnable grâce à la pratique de la gravure sur bois, sur pierre ou sur métal. Pour autant, si l’iconographie constitue une indéniable valeur ajoutée, la qualité de réalisation et d’impression est très variable d’un livre à l’autre. Dans le meilleur des cas, les illustrations peuvent être de véritables œuvres d’art et représenter parfois le principal attrait d’un ouvrage. C’est ainsi que, pour les bibliophiles et les collectionneurs, la présence d’estampes est souvent un élément déterminant dans leur quête de livres anciens.

C’est à ce public, mais aussi aux historiens de l’art, aux peintres à la recherche de modèles ou d’inspiration, et aux personnes désirant mettre leurs ouvrages en vente, qu’est prioritairement destiné ce livre intitulé Manuel de l’amateur d’estampes. Son premier tome est publié en 1854, sous forme de souscriptions et de livraisons, par l’entremise du libraire et bibliophile Pierre JANNET. À vrai dire, LE BLANC n’est pas le premier à avoir imaginé un tel ouvrage puisqu’un imprimeur lyonnais, du nom de François-Étienne JOUBERT, avait déjà publié en 1821 un livre en trois volumes portant exactement le même titre. Mais il apparaît rapidement que la nouvelle version, qui a le mérite d’être actualisée, en particulier pour les résultats des ventes, est beaucoup plus fouillée et complète que sa devancière. Pour autant, l’auteur ne s’encombre pas de détails biographiques, au point de ne consacrer qu’une quinzaine de lignes au résumé du parcours d’un graveur célèbre comme Jacques ANDROUET du CERCEAU. Son principal objectif est de ne fournir au lecteur chevronné ou profane que “les indications nécessaires pour faire reconnaître facilement chaque pièce”. Le plan de LE BLANC est calqué sur le système de BRUNET : “À la suite de la description vient le nom du peintre d’après lequel l’estampe a été gravée, puis sa mesure exacte, l’indication de ses différents états, et enfin le prix auquel elle a été portée dans les ventes.” Cette méthode a l’avantage de pouvoir intégrer dans le manuel les graveurs anonymes. Pour ces derniers, l’auteur part de la signature apposée sur l’estampe, parfois de simples initiales ou un monogramme reproduits dans la notice, pour les intégrer dans le classement alphabétique d’ensemble.

Pour l’essentiel, le livre recense les gravures “remarquables“, dont certaines d’attribution “douteuse“, dans des notices classées par ordre alphabétique où sont indiqués leur localisation bibliographique, leurs dimensions et les prix obtenus lors des ventes publiques.  C’est ainsi que Johan Martin BERNIGEROTH compte 1252 références, Pierre-Philippe CHOFFARD, 68, et Jacques CALLOT, dont la réputation justifie la biographie la plus développée, 1405. À titre d’exemple, l’estampe n°1250 de ce dernier a été vendue 37 francs dans une vente et 9 florins 36 couronnes dans une autre. La lecture de ces notices, souvent rédigées dans un style télégraphique, est pour tout dire assez fastidieuse. En effet, hormis les signatures, le livre ne comprend aucune illustration et l’auteur reste avare de descriptions détaillées, contrairement au livre de BRUNET qui relate des anecdotes. Malgré tout, le Manuel de l’amateur d’estampes est un livre pratique qui force l’admiration pour la masse d’informations qu’il renferme.

LE BLANC semble avoir été quelque peu débordé par son projet, à moins que des circonstances extérieures, qui nous sont inconnues, n’aient freiné son élan. En effet, si le deuxième volume paraît en 1856, à la mort de l’auteur en 1865 seules 169 pages du troisième tome ont été livrées aux souscripteurs. En 1888, les libraires Émile BOUILLON et Émile VIERWEG reprennent le projet en rééditant les deux premiers tomes avec le troisième qui était resté inachevé. En 1890, le quatrième et dernier volume voit le jour, édité cette fois en solo par la librairie Bouillon. Ce sont ces quatre volumes dont est constitué l’exemplaire de la collection Dicopathe.

L’achèvement de ce projet est redevable à un auteur resté curieusement anonyme. À son sujet, la préface du quatrième tome se contente de préciser sans le nommer : « Nous n’oublierons point non plus le savant modeste et consciencieux qui a bien voulu nous aider à mener ce travail à bonne fin, car il s’agissait de le compléter à l’aide des quelques documents laissés par feu Ch. LE BLANC, qui ne se composaient en général que de simples noms d’appel. Le travail de coordination était donc à faire en entier. Grâce à son dévouement, la première partie du plan que LE BLANC s’était tracée est remplie. » Un supplément était programmé pour contenir des Considérations sur l’histoire de la gravure, ainsi qu’une table méthodique des estampes décrites ; il ne paraîtra jamais…

Notre exemplaire porte un ex-libris au nom de DE GUIGNE.



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