Manuel de biographie, ou Dictionnaire historique abrégé des hommes célèbres
depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, composé sur le plan du Dictionnaire de la fable de CHOMPRÉ
Auteur(s) : JACQUELIN Jacques André
revu et augmenté par M. NOËL
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Après de solides études qui feront de lui un excellent latiniste, Jacques-André JACQUELIN se consacre à l’écriture de pièces de théâtre, aussi bien des tragédies que des comédies ou des farces burlesques. Il rencontre quelques succès avec la troupe du théâtre des Jeunes-Artistes, mais, bientôt ruiné, il doit se résoudre à occuper un poste subalterne au ministère de la guerre tout en continuant de produire de nouvelles pièces. Peu à peu sa situation professionnelle et pécuniaire s’améliore, et en 1812 il est admis dans la Société du caveau moderne, goguette parisienne animée par une confrérie de poètes et de chansonniers, dont il devient le secrétaire général en 1815. Il se ralliera avec empressement à la Restauration et poursuivra sans encombre sa prolifique carrière de littérateur.
C’est d’une manière un peu inattendue que JACQUELIN est sollicité par le libraire Nicolas RORET pour rédiger un dictionnaire de biographie. Ce dernier projette alors d’éditer une collection intitulée Manuels formant une encyclopédie des sciences, des arts et des belles-lettres, série d’ouvrages de vulgarisation à prix modique. Il s’agit d’une compilation destinée à un large public, dont l’objectif est somme toute modeste : « Les jeunes gens des collèges et les hommes de la société qui n’ont besoin que de connaissances superficielles trouveront dans celui-ci, les uns, de quoi satisfaire leur désir d’apprendre, ou de se souvenir de ce qu’ils ont appris ; les autres, le moyen de se donner facilement une teinte d’érudition, et de pouvoir prononcer avec sûreté sur les grands hommes qui ont honoré la Terre et font encore la gloire de la France. »
Publié pour la première fois en 1825, le Manuel de biographie, ou Dictionnaire historique abrégé des hommes célèbres depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, est remanié en vue d’une seconde édition, celle ici présentée, qui paraît en 1835. Sur la page de titre, cette nouvelle version est attribuée à un certain M. NOËL, dans lequel nous reconnaissons François-Joseph NOËL. Mais cette paternité est contestée par certains qui pensent que ce dernier, par ailleurs écrivain particulièrement fécond, n’a servi que de prête-nom dans l’entreprise.
L’auteur ne prétend pas avoir fait preuve d’originalité, comme l’indique la page de titre qui précise que le plan suivi est celui du Dictionnaire de la fable de CHOMPRÉ qui a « été approuvé par les bons esprits » et en est alors à sa trentième édition. Dans l’avertissement inséré en tête du livre, il qualifie son dictionnaire de « résumé impartial », revendiquant ainsi une approche neutre et objective des personnages qu’il décrit. Se refusant à revenir sur les polémiques du passé et à renouer avec l’esprit critique du temps des Lumières et de la période révolutionnaire, il professe même une réelle « probité littéraire » et ajoute, non sans une certaine candeur, que « notre politique consiste à chérir notre roi, à obéir aux lois, à respecter la religion de nos pères, et à suivre la ligne de nos devoirs ».
Pourtant JACQUELIN ne se prive pas de démonter son parti-pris en déclarant dès la préface que « nous en avons rejeté tous ces prétendus grands hommes qui ne font qu’enfler certains dictionnaires, et ne servent qu’à vendre du papier imprimé ». Même s’il prétend que « chacun y a été traité selon son mérite », les notices sont de longueur très inégale et ouvertement subjectives, révélant ainsi ses préférences et ses opinions. Certaines grandes figures de la Révolution, comme DANTON, COLLOT d’HERBOIS et MARAT sont bien vite résumées, affublés de qualificatifs peu flatteurs, comme « monstre » ou « démagogue féroce ». Quand il évoque ROBESPIERRE, « homme sanguinaire », il se demande « comment un homme d’un talent aussi médiocre, d’une aussi grande lâcheté, a pu étendre sur la France une tyrannie aussi épouvantable ». Si l’auteur boude carrément LAFAYETTE et SIEYÈS, il se montre par contre d’une neutralité très “clinique” vis-à-vis des personnages de la période napoléonienne et ne ménage pas son enthousiasme pour ROUSSEAU et VOLTAIRE.
Cet ouvrage fut la seule incursion de JACQUELIN dans le domaine historique ; jusqu’à sa mort, survenue en 1827, il continuera à publier des comédies et des vaudevilles.