Dizionario militare francese-italiano
Auteur(s) : D'AYALA Mariano
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Mariano D’ALAYA, à peine sorti de l’école militaire napolitaine de Nunziatella avec un grade de sous-lieutenant (alfiere), est remarqué par le général Carlo FILANGIERI qui cherche à moderniser l’armée du Royaume des Deux-Siciles. En 1837 il réintègre son ancienne académie en tant que professeur de balistique et de géométrie. Bien qu’issu d’une famille de militaires fidèles aux Bourbons, il est suspecté de nourrir des idées libérales et d’être proche d’anciens partisans de MURAT. Circonstance aggravante, sa participation au premier congrès des scientifiques italiens le classe parmi les sympathisants du Risorgimento et de l’unification italienne.
Après avoir été la langue de la Renaissance par excellence, l’italien souffre à l’époque d’une fragmentation en de multiples dialectes et variantes régionales qui correspond à la division politique d’une péninsule divisée et en partie tenue sous domination étrangère. Pour de nombreux patriotes, l’unité italienne doit se réaliser prioritairement au niveau de la langue, et dans cette perspective le toscan est en passe de devenir la matrice de langue italienne unifiée. Si l’italien continue à être utilisé comme vocabulaire artistique et littéraire, D’AYALA constate qu’en dehors de ce domaine particulier ses compatriotes privilégient trop souvent des mots d’origine étrangère, alors qu’existent des équivalents dans la langue nationale : « N’est-ce pas un dommageable et fâcheux abaissement d’adopter les expressions et les attitudes des langues d’au-delà des Alpes ? » (Non è dunque nauseosa ed increscevole l’abbiettezza di accattare espressioni ed attitudini dalle lingue di Oltralpe ?).
D’AYALA entend rappeler que l’Italie a connu par le passé de grands stratèges mais aussi nombre d’ingénieurs et de théoriciens de l’art militaire. En témoignent les 34 pages de bibliographie militaire italienne qui, placées en préambule, présentent des écrits italiens allant de la Renaissance à 1841. Ce faisant, l’auteur cherche à redorer le blason d’une science militaire purement italienne fortement occultée par le fait que l’Italie a longtemps servi malgré elle de champ de bataille aux grandes puissances européennes, notamment à la France. D’AYALA insiste sur le fait que « la plupart des livres militaires d’aujourd’hui sont rédigés ou traduits de cette langue [le français] » (la maggior parte dei libri militari d’oggidì sono in cotal favella dettati o tradotti). Ce dictionnaire, en premier lieu conçu pour les élèves des écoles militaires, est destiné à les aider pour une bonne traduction des expressions françaises en termes italiens réellement équivalents et leur éviter des contresens et de mauvaises interprétations.
Sans surprise, on retrouve dans ce Dizionario militare francese-italiano tout le vocabulaire martial de rigueur, de l’artillerie à la cavalerie, en passant par le génie et la marine. Dans l’ouvrage nous retrouvons les ordres, les instructions et autres commandements classiques, tels qu’Abattre le chien (Scaricare il cane), Apprêter les armes (Preparate armi), ou encore Au grand galop (A tutta carriera), Déchirez la cartouche (Stracciate cartuccia) et À bas le monde (Abasso). De son propre aveu, D’AYALA n’a pas voulu multiplier les exemples, et il s’attache à rester sobre et concis dans ses définitions, même si ponctuellement certains termes comme Torpille justifient une explication plus développée.
Pour autant il n’hésite pas à agréger à un terme polysémique tous ses sens dérivés ; par exemple, sous la définition générale de Baril, il cite le Baril à poudre, le Baril à ébarber, le Baril à bourse, le Baril incendiaire, ou encore le Baril foudroyant. De même, au lieu, pour certains “mots-clés”, de multiplier les renvois, il leur joint tous les termes qui s’y rattachent. Ainsi, dans la définition d’Avant-train, il en énumère les différentes composantes comme l’Essieu, la Coiffe de sellette ou la Bride de bout de fourchette. Idem pour l’article Mortier qui regroupe les termes Embase, Gorge de la volée, Pourtour de la chambre et Âme.
Si les expressions et termes typiquement militaires composent le cœur du livre, le lecteur peut constater que l’auteur élargit son propos à des lexiques voisins, en particulier ceux des sciences, des techniques et même de l’industrie, dans la mesure où ils peuvent être utilisés dans une optique militaire ; c’est ainsi que les termes Acier de cémentation, Haut-fourneau, Houille et Antimoine peuvent être indirectement reliés à l’art militaire. Certaines définitions de métiers, comme maçons, menuisiers ou mineurs, recensent les outils spécifiques à l’exercice de ces professions.
À la suite de son dictionnaire, D’AYALA a inséré une Storia degli ordini cavallareschi e militari dédiée aux différents ordres de chevalerie et confréries militaires existant en Europe depuis le Moyen Âge. C’est ainsi qu’il cite en français l’ordre de l’aigle blanc du royaume de Pologne, l’ordre de l’éléphant danois ou l’ordre des saints Maurice et Lazare, auquel il appartient et qui est emblématique des fidèles la maison de Savoie.
Démis de son poste de professeur dès 1843, D’AYALA se trouve impliqué dans deux complots, puis en 1848, suite au durcissement du régime, il s’exile en Toscane et participe un temps au gouvernement révolutionnaire qui vient de se mettre en place à Florence. Rentré à Naples à l’occasion d’une amnistie, il incite les officiers à abandonner la cause des Bourbons. À l’arrivée de GARIBALDI, il est nommé pendant quelques mois à la tête de la garde nationale avant de devenir député puis sénateur. Parallèlement il poursuivra sa carrière militaire et, en 1862, il deviendra général de division.
Le livre s’ouvre sur une dédicace à FERDINAND II, roi des Deux-Siciles.