Fossiles, Minéralogie, histoire naturelle

Dictionnaire universel des fossiles propres et des fossiles accidentels

contenant une description des terres, des sables, des sels, des soufres, des bitumes; des pierres simples & composées, communes & précieuses, transparentes & opaques, amorphes & figurées, des mineraux, des métaux, des pétrifications du règne animal, & du règne végétal &c. avec des recherches sur la formation de ces fossiles, sur leur origine, leurs usages, &c.

Auteur(s) : BERTRAND Élie

 à Avignon, chez Louis CHAMBEAU, imprimeur-libraire, près les RR. PP. Jésuites
 édition originale
  1763
 1 vol (XXXII-606 p.)
 In-douze
 plein veau fauve, dos à cinq nerfs, pièce de titre dorée
 bandeaux décoratifs, lettrines ornées, culs-de-lampe


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Issu d’une famille huguenote originaire de Toulouse et réfugiée en Suisse après la révocation de l’édit de Nantes, Élie BERTRAND étudie à Lausanne les belles-lettres grecques et latines, les mathématiques et la philosophie. En 1732, il s’installe à Genève, où il suit un cursus en théologie, parallèlement à des enseignements de physique et de “droit naturel”. Devenu pasteur en 1740, il dessert la paroisse de Ballaigues avant d’entrer comme diacre au service de l’Église française de Berne, dont il devient le pasteur en 1756. Esprit brillant et érudit, il est l’auteur de plusieurs publications scientifiques marquées par sa prédilection pour la physique et la géologie. Mais, pour autant, il ne dédaigne pas la morale, la philosophie et la linguistique. Le savoir reconnu de BERTRAND lui vaut d’appartenir à plusieurs académies et sociétés savantes européennes. Recruté par son ami VOLTAIRE, il participe marginalement à l’aventure de l’Encyclopédie, dans laquelle seuls deux de ses articles, sur les quarante-six qu’il a rédigés, intègrent l’ouvrage. Les critiques de D’HOLBACH sur la qualité de son travail et les menaces qui se précisent alors sur l’entreprise encyclopédique l’incitent à se retirer en 1759, lui laissant tout loisir de réaliser un ouvrage sur un thème qui lui tient particulièrement à cœur : les fossiles.

Étudiée depuis l’Antiquité, l’origine de ces vestiges donne lieu à des interprétations diverses, tantôt fantaisistes, tantôt pseudo-scientifiques, certains y voyant des reliquats du Déluge ou des formations spontanées. À partir des XVIIet XVIIIe siècles, les fossiles, devenus des véritables vedettes des cabinets de curiosités, font désormais l’objet d’une étude plus poussée. Même si la science, qui prendra plus tard le nom de paléontologie, n’en est alors qu’à ses prémices, une  discipline scientifique, à la croisée de la géologie et de la biologie, commence à émerger grâce à des auteurs comme John WOODWARD et Johann-Jakob SCHEUCHZER. Ces derniers, bien qu’encore fidèles à la thèse diluvienne, focalisent leurs études sur les liens entre la lithologie et la conchyliologie. En 1755, le naturaliste DEZALLIER d’ARGENVILLE popularisera le terme « oryctologie » pour désigner la partie de l’histoire naturelle consacrée à l’étude des fossiles.

BERTRAND décide de présenter son étude sous forme de dictionnaire. Il entend la baser sur le travail de SCHEUCHZER, en particulier sur l’édition révisée et augmentée publiée par Jakob Theodor KLEIN à Dantzig en 1740, et parue sous le titre Lapidum Figuratorum Nomenclator. Notre homme se fixe comme objectif de proposer un ouvrage “qui, ne se bornant point à la classe des pierres, embrasse tous les fossiles, & dont les articles ayant la plénitude nécessaire pour faire connaître du moins les classes, les ordres, les genres, & les espèces de ces corps, si differens que l’on tire de la terre, & pour donner quelque idée de leur origine, de leur formation & de leurs usages. C’est cet ouvrage que j’ai entrepris, aidé de tous les Auteurs qui ont écrit sur la Minéralogie. Ce sera le Dictionnaire universel oryctologique. On a déjà, je le sçai, plusieurs Dictionnaires, qui, dans différentes vues & avec plus ou moins de succès, embrassent divers articles de l’Oryctologie : mais il n’en est encore aucun qui les renferme tous, avec le plan systématique d’une science élémentaire qui puisse servir à tout le monde”.

Considérant que “tout est lié dans la nature” et que la science des fossiles ne peut être abordée en la dissociant de la géologie, BERTRAND ne se limite pas aux éléments organiques piégés accidentellement dans une roche sédimentaire puis minéralisés. Il étend son étude à ” tout ce qui se tire de la terre ou qui se trouve dans son sein ; soit qu’il y soit propre, comme les sables, les terres, les pierres, les sels, les soufres, les bitumes, les minéraux, les métaux ; soit qu’il s’y rencontre accidentellement, comme les coquilles fossiles & les pétrifications des animaux, des végétaux, des lithophytes & des zoophytes”. Il en résulte que “ce dictionnaire doit donc renfermer, en abrégé, tout le règne des fossiles, tout ce que la minéralogie, la lithologie, la métallurgie, la docimasie présentent de plus universel & de plus essentiel”.

Le livre, dépourvu de planches et d’illustrations, prend la forme d’une encyclopédie de poche consacrée à la géologie. Nous y retrouvons aussi bien le pétrole, la pierre néphrétique, la terre à foulon, le diamant, la pyrite et la chrysolite, que les bélemnites, les oursins et les échinidés fossilisés, les nautiles, la stéléchite, c’est-à-dire le bois pétrifié, et  les strombites. L’auteur a classé son dictionnaire en fonction du nom français, systématiquement suivi du nom latin et, éventuellement, du nom dans une autre langue, comme l’allemand ou l’italien.

Soucieux de pédagogie, BERTRAND livre ses conseils pour réaliser des cabinets d’histoire naturelle. Sous réserve d’être intelligemment conçu, ce dispositif peut constituer un “vrai théâtre, où un Maître pourroit enseigner l’histoire naturelle, & où un observateur pourroit en prendre le goût & les premières instructions : mais pour cela il faudroit que tout y fût placé dans la vue d’instruire, & non pas seulement de plaire aux yeux”. Admirateur de LINNÉ, il prône le classement systématique en cinq parties des éléments de la nature : classes, ordres, genres, espèces et variétés. La rigueur scientifique ne peut s’imposer que par une démarche méthodique et l’établissement de nomenclatures, car “les deux premiers demiers degrés de la science, c’est la connoissance des noms & celle de la division des choses. Propriétés génériques & différences spécifiques, voilà ce qu’il faut d’abord saisir en retenant en même temps les noms propres convenables & adoptés”. Il rédigera, en 1766, un complément à son dictionnaire qui s’intitulera Recueil des différents traités sur l’histoire naturelle de la terre et des fossiles.

En 1765, la réputation scientifique de BERTRAND lui vaut d’être invité par le roi de Pologne Stanislas PONIATOWSKI. Quittant Berne, où son amitié avec VOLTAIRE lui vaut d’être mal considéré, il gagne Varsovie pour être nommé conseiller aulique et diriger, pendant une année, le Département de l’industrie, de l’agriculture et des sciences naturelles. En 1768, il regagne la Suisse où, installé à Yverdon, il participe à l’encyclopédie que Fortunato Bartolomeo FELICE met en chantier en vue de corriger et de compléter l’encyclopédie “parisienne”. C’est dans cette cité que Bertrand décède en août 1797.

Le livre s’ouvre sur une dédicace à FRÉDÉRIC V, roi du Danemark.



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