Dictionnaire raisonné des eaux et forêts
Tome premier ; composé des anciennes & nouvelles ordonnances ; des édits, déclarations & arrêts du Conseil rendus en interprétation de l'ordonnance de 1669 ; des coutumes, arrêts du Conseil & autres cours souveraines, règlemens généraux & particuliers de réformation, décisions des ministres, des grands-maîtres & des jurisconsultes. Contenant l'explication des termes appartenans à la matière des eaux & forêts, & la forme particulière de affaires qui se poursuivent aux maîstrises ; suivi du recueil des édits, déclarations, arrêts réglemens & autres pièces non imprimées jusqu'à présent, qui sont entrés dans cet ouvrage ; avec deux tables, l'une par ordre chronologique, l'autre par ordre alphabétique des matières| Tome second ; contenant les édits, déclarations, arrests du Conseil et autres Cours souveraines, règlemens, décisions, &c., &c., pour servir de suite au Dictionnaire raisonné des Eaux & Forêts depuis 1663, jusqu'en 1768
Auteur(s) : CHAILLAND Bonaventure
Plus d'informations sur cet ouvrage :
Bonaventure CHAILLAND occupe la charge de procureur du roi en la maîtrise particulière des eaux et forêts de Rennes entre 1750 et 1767. Dans l’exercice de sa fonction il ressent la nécessité d’« un ouvrage qui présentât… tout ce qui pouvoit avoir rapport à chaque partie de la matière des eaux & forêts ». C’est ainsi qu’il élabore au fur et à mesure de son activité « des tables de ce que je lisois & apprenois par l’usage ». C’est donc en partant d’un recueil rédigé à usage personnel que l’auteur construit le Dictionnaire raisonné des eaux et forêts présenté ici.
Bien que fondée dès le Moyen Âge, l’administration des eaux et forêts demeure embryonnaire au début du XVIIe siècle. Elle rencontre bien des difficultés à réguler l’exploitation du bois, à contrôler le domaine royal et à enrayer le recul constant des surfaces boisées. Le bois représente pour l’État une matière première stratégique, surtout depuis que la monarchie a entrepris de doter la France d’une marine de premier plan et de développer les manufactures. Dès 1661, LOUIS XIV confie à COLBERT la mission de réformer l’administration. Il en résulte que les forêts royales sont désormais fermées au public, certaines parcelles réintégrées, les plantations, les essences et les prélèvements rigoureusement surveillés. En 1663, un édit consacre le droit de gruerie de l’administration royale pour les forêts rattachées à des domaines ecclésiastiques.
Supervisée par COLBERT, l’ordonnance de 1669 de Louis XIV « sur le fait des Eaux et Forêts » dote le pouvoir royal des instruments juridiques et administratifs nécessaires pour mener une réelle politique en matière forestière. Elle consiste à règlementer et à uniformiser l’exploitation des forêts en s’appuyant sur un code forestier unifié et une administration organisée bien répartie sur l’ensemble du territoire (18 grandes maîtrises et 134 maîtrises). Cette organisation est ensuite complétée au cours des décennies suivantes par une série d’édits et de règlements.
Depuis l’ordonnance de 1669, la mention “Eaux” regroupe les fleuves et les rivières navigables qui deviennent rivières royales à partir de l’endroit où elles commencent “à porter bateau” jusqu’à la mer. Le domaine règlementé englobe les ressources (pêche) et les activités humaines sur les berges (moulins, rouissage du lin et du chanvre) sur lesquels l’administration exerce son autorité. Les autres rivières et cours d’eau relèvent de propriétaires privés, le plus souvent seigneuriaux ou ecclésiastiques.
Fort de sa longue expérience professionnelle et d’un gros travail de compilation, CHAILLAND expose clairement les différents édits, les ordonnances, et privilégie le côté pratique de son ouvrage en insistant sur les « principes & décisions sur toutes les difficultés qui peuvent naître entre particuliers au sujet de l’usage des mêmes eaux et forêts ». Les multiples petits conflits que doit arbitrer et trancher sa juridiction sont à la base d’une importante jurisprudence qui, regroupée ici, confère à l’ouvrage une valeur ajoutée appréciable.
Peu de choses échappent au regard du législateur. Tout ou presque y est encadré, et nombreux sont ceux qui blâment le côté tatillon du code forestier. Au hasard de la lecture, on apprend que, juridiquement, « les cadavres des noyés dans le rivières sont une espèce d’épave », qu’« il est défendu aux gardes des forêts du Roi de tenir cabaret ou hôtellerie, même de boire avec les délinquants qui leur sont connus », ou qu’« il est défendu à toutes personnes de prendre les œufs des perdrix, en quelque lieu que ce soit, à peine de 100 livres d’amende pour la première fois, du double pour la seconde, du fouet & du bannissement à six lieues pendant cinq ans pour la troisième ». Il également rappelé que « l’ordonnance des Eaux et forêts prononce des peines très rigoureuses contre ceux qui violeront le précepte de la sanctification des fêtes et dimanche. L’article 4 du titre 31 fait défense aux pêcheurs de pêcher jour de fête, à peine de quarante livres d’amende. » L’incendie, criminel ou accidentel, est un délit très grave (voir les articles Incendiaires et Feu), passible de mort, des galères ou, au mieux, du fouet.
Le dictionnaire proprement dit est constitué par le premier tome. Le second livre rassemble chronologiquement les textes juridiques essentiels, depuis 1663 jusqu’à la publication du dictionnaire : ordonnances, arrêts, édits, etc.
À la fin du premier tome, une partie additionnelle regroupe les notes détaillées issues d’auteurs cités dans l’ouvrage.