Dictionnaire législatif et réglementaire des chemins de fer
Résumé des documents officiels en vigueur et des principaux renseignements pratiques sur l'établissement, l'entretien, la police et l'exploitation des voies ferrées ; personnel, exploitation technique, matériel, voie, service commercial
Auteur(s) : PALAA Germain
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En 1827, la France est le premier pays en Europe occidentale à accueillir une ligne ferroviaire sur son sol. Pourtant, rapidement distancée par d’autres nations comme la Grande-Bretagne, l’Allemagne ou la Belgique, elle tarde à développer ses lignes. Élaborée pour procurer un véritable essor à l’extension du réseau français, la loi du 11 juin 1842 jette les bases d’un partenariat public-privé original. Ce système prévoit que l’État acquière les terrains situés sur les tracés des voies et finance directement la construction des infrastructures, alors que l’exploitation proprement dite est concédée à des compagnies privées. C’est à ces dernières qu’il incombe de construire les superstructures, dont les voies ferrées, et d’acheter le matériel roulant tout en bénéficiant, en contrepartie, d’un monopole d’exploitation. Grâce à cette fructueuse collaboration, le chemin de fer, devenu attractif pour de nombreux spéculateurs, se développe très rapidement. En 1850, il existe 33 compagnies, qui en 1859 se regrouperont pour ne former que six grandes sociétés. En 1870, le réseau français compte 17430 kilomètres de voies ferrées, sur lesquelles circulent annuellement 109 millions de voyageurs et 33 millions de tonnes de marchandises.
En quelques décennies, après le flou initial et bien des tâtonnements, des réglementations et des lois viennent encadrer les activités de l’ensemble du secteur ferroviaire. Conçu pour diriger et organiser les chantiers, c’est le corps des ingénieurs des Ponts et Chaussées, composé d’étudiants issus de Polytechnique, qui est prioritairement sollicité pour fournir des conducteurs de travaux. En 1864, l’un d’entre eux, Jean-Germain PALAA, “Chef de bureau de l’ingénieur en chef du contrôle des chemins de fer de Paris à Lyon et à Genève”, publie une synthèse juridique intitulée Dictionnaire législatif et réglementaire des chemins de fer. Cet ouvrage ambitionne d’être le vadémécum pratique qui permet de se retrouver dans la “jungle” des textes officiels.
Né à Orthez en 1821, PALAA suit une brillante carrière de conducteur des Ponts et Chaussées dans différents bureaux de contrôle des compagnies. Il est apprécié de sa hiérarchie, qui soutient sans réserve son projet de “recueil des documents intéressant l’exploitation des chemins de fer” et juge que le livre “sera très utile aux fonctionnaires du contrôle, aux agents de compagnies et même au public”. La démarche vise à proposer un outil accessible au plus grand nombre : “Les employés et agents attachés aux services des chemins de fer, les propriétaires riverains, les voyageurs, les commerçants, les expéditeurs, les fonctionnaires du contrôle, les ingénieurs, les magistrats, pourront consulter utilement ce recueil et y puiser des renseignements qui, par leur diversité même et leur dispersion dans un grand nombre de documents, échappent aux recherches, quelquefois au moment le plus opportun. À ce point de vue, tout le monde sait qu’en matière de chemins de fer, le plus simple renseignement recueilli à propos peut prévenir, dans beaucoup de cas, un fait grave, une fausse démarche, ou arrêter à leur origine les différends, les conflits et souvent aussi les procès ruineux.”
Répondant à un réel besoin, le livre favorablement accueilli connaîtra en 1872 une seconde édition augmentée et actualisée pour tenir compte du développement rapide du réseau. La qualité du travail de l’auteur, reconnue en haut lieu, lui vaut d’être fait chevalier de la Légion d’honneur en 1880. L’année précédente, l’ambitieux plan d’équipement et d’infrastructures de transport, lancé par le ministre des Travaux publics Charles de FREYCINET, prévoyait de développer le réseau à hauteur de 8700 kilomètres de voies supplémentaires. Innovation importante, la loi du 20 novembre 1883 vient instituer le “Régime des chemins de fer”. À la veille de son départ en retraite, PALAA obtient un sursis pour pouvoir publier une édition actualisée. Cette version datée de 1887, celle présentée ici, bénéficie à nouveau d’un tirage flatteur permettant à son auteur de prendre sa retraite à Bordeaux et de profiter de confortables droits d’auteur. Pour autant l’homme, qui ne se repose pas sur ses lauriers, reste à l’affût de toutes les nouveautés législatives et réglementaires dans le domaine des chemins de fer. Cette veille attentive lui permet, en 1894, de présenter au public un Supplément général de la 3e édition.
Quelques extraits
*Animaux : Les animaux de petite taille, tels que chiens, chats, cochons de lait, cochons d’Inde, lapins, singes, écureuils, oiseaux, placés dans les cages ou paniers fournis par les expéditeurs, sont taxés au poids, conformément aux prix et conditions du tarif général des articles de messagerie et marchandises à grande vitesse, et pour le double de leur poids réel, cumulé avec celui des cages ou paniers.
*Excavations : Dans les localités où le chemin de fer se trouvera en remblai de plus de trois mètres au-dessus du terrain naturel, il est interdit aux riverains de pratiquer, sans autorisation préalable, des excavations dans une zone de largeur égale à la hauteur verticale du remblai, mesurée à partir du pied du talus. — Cette autorisation ne pourra être accordée sans que les concessionnaires ou fermiers de l’expl. du ch. de fer aient été entendus ou dûment appelés.
*Ouverture des portières : L’art. 63 de l’ordonn. du 15 nov. 1846 contient défense d’entrer dans les voitures ou d’en sortir autrement que par la portière qui fait face au côté extérieur de la ligne du chemin de fer, et de se pencher au dehors de ces voitures. Ces utiles prescriptions, auxquelles les voyageurs contreviennent trop facilement, sont indiquées textuellement à l’art. Voyageurs.
*Haut-le-pied : Retour des locomotives. L’expression haut-le-pied est appliquée sur les chemins de fer, notamment lorsqu’une machine locomotive, après avoir accompagné un train en double traction pour l’aider à gravir une forte rampe, ou pour tout autre motif, ou lorsqu’elle est allée porter secours à un train en détresse, est dételée et ramenée immédiatement au dépôt. Elle retourne alors haut-le-pied à son dépôt.
*Outrages à la pudeur : L’outrage à la pudeur commis dans un compartiment, dont les glaces étaient baissées, d’une voiture à voyageurs d’un train de ch. de fer en marche, alors qu’on pouvait voir du dehors ce qui se passait dans l’intérieur de cette voiture et que l’acte incriminé a pu être aperçu du public, sur un ou plusieurs points du trajet, est prévu et puni par l’art. 330 du C. pénal. (C. C, 19 août 1869).