Paris (Ville), Histoire de France, Ile-de-France

Dictionnaire historique de la ville de Paris et de ses environs

dans lequel on trouve la description des Monumens & Curiosités de cette Capitale, l’établissement des maisons religieuses, celui des Communautés d’artistes & d’artisans; le nombre des rues & leur détail historique, tous les collèges & les bourses qui leur sont affectées, &c. &c. &c. avec le plan nouveau de la ville, des environs à quinze lieues au moins à la ronde. Dans ces derniers, on donne l’historique des châteaux, la nature du sol, les patrons & collateurs des cures & bénéfices, &c.

Auteur(s) : HURTAUT Pierre-Thomas-Nicolas, MAGNY L. de

 A Paris, chez MOUTARD, imprimeur-libraire de la reine, hôtel de Cluny, rue des Mathurins
 édition originale
  1779
 4 vol. : tome 1. A-B (VIII-720 p.), tome 2. C-E (792 p.), tome 3. F-(784 p.), tome 4. (000p.)
 In-octavo
 reliure restaurée avec plats anciens et dos pastiche datant du XIXe siècle, dos à cinq nerfs, avec caissons ornés de motifs floraux dorés, pièces de titre et de tomaison de maroquin rouge
 2 cartes dépliantes, bandeaux décoratifs


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Peu disposé à reprendre le commerce d’un père marchand de chevaux, Pierre-Thomas-Nicolas HURTAUT poursuit de brillantes études. Il se consacre ensuite à l’enseignement comme professeur de latin à l’École militaire de Paris. Se vouant à la littérature, il est l’auteur d’une œuvre pour le moins éclectique comportant aussi bien des ouvrages “sérieux” sur l’histoire et la langue française, dont un remarqué Dictionnaire des mots homonymes de la langue française, que des livres parodiques comme le très curieux Art de péter.

Répondant sans doute à une commande, il réalise un Dictionnaire historique de la ville de Paris et de ses environs. L’ouvrage, ici présenté en édition originale, est publié courant 1779 par la librairie Moutard. Pour sa rédaction il se trouve associé à un certain L. de MAGNY, au sujet duquel nous ne disposons d’aucune information biographique sérieuse, sinon qu’il est « un ancien premier commis de la ferme du Roy » et qu’il décède alors que le livre est encore sous presse.

Le but avoué des auteurs consiste à réaliser un guide pratique pour une ville qui alors fascine l’Europe entière. L’objet du livre est donc de « décrire une ville immense dont l’aspect surprend & étonne ; conduire l’étranger dans ses places & ses rues ; lui en apprendre les noms & l’étymologie ; entrer avec lui dans ses temples, ses palais & ses jardins ; s’il est scavant, l’accompagner dans les bibliothèques & dans les cabinets de raretés ; feuilleter les archives de ses anciens édifices ; assister à ses spectacles & à ses amusemens ; parcourir les promenades intérieures & extérieures ; visiter les environs à vingt lieues à la ronde, pour en connaître le sol, les productions, les églises, les châteaux, les curiosités, &c. &c. &c. Voilà l’idée succincte du Dictionnaire de la ville de Paris que nous offrons aujourd’hui avec les détails que nous en ont fournis les différens écrivains. »

Paris passe de 420 000 à 600 000 habitants entre 1700 et 1790, mais la ville a perdu au profit de Londres son titre de plus grande ville européenne. Pour autant elle connaît un véritable âge d’or qui fait d’elle la véritable capitale européenne des arts et des lettres de son temps. HURTAUT résume ce statut privilégié en ces termes : « On voit [à Paris], dans tous les genres, ce que le génie le plus sublime & l’esprit humain ont pu imaginer en grandeur & en magnificence. » Ce jugement flatteur mériterait d’être nuancé, mais il n’en est pas moins très largement partagé à l’étranger où Paris fait l’objet d’une certaine fascination et engendre toute une littérature destinée à la célébrer et à la décrire.

Il est vrai que, depuis le XVIIe siècle, la ville s’est dotée de monuments et d’ensembles architecturaux remarquables qui font école dans l’Europe entière. Paris, qui abrite à l’époque une importante communauté d’artistes et de savants français et étrangers, connaît alors dans le contexte des Lumières une vie littéraire et intellectuelle particulièrement brillante. Par ailleurs il s’y cultive, au niveau de ses élites, un art de vivre marqué par une célébration du plaisir et une conception de la morale plus souple et plus libérale que dans les autres pays européens.

Pour réaliser leur dictionnaire, HURTAUT et MAGNY se sont largement appuyés sur des œuvres antérieures, en particulier sur la monumentale Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris, de l’abbé Jean LEBEUF. Publié en quinze tomes entre 1754 et 1758, ce sommet d’érudition est toujours considéré comme une source incomparable d’informations sur l’histoire de la capitale. LEBEUF était l’un des premiers à élargir son champ d’investigation aux paroisses et aux localités voisines de Paris dans un rayon de quinze lieues alentour. Les auteurs se sont également plongés dans l’ouvrage intitulé Description de Paris, de Versailles, de Marly, de Meudon, de S. Cloud, de Fontainebleau & de toutes les autres belles Maisons & Châteaux des Environs de Jean-Aymar PIGANIOL de LA FORCE, un des grands succès littéraires de l’époque.

Tout en rédigeant des notices historiques plutôt denses, les auteurs prennent le parti de décrire très en détail l’intérieur et l’extérieur des monuments remarquables, sans jamais oublier une statue ou une peinture. Les descriptions des édifices religieux sont particulièrement fouillées, les auteurs poussant le souci d’exhaustivité jusqu’à rapporter in extenso les longues épitaphes en latin figurant sur les tombeaux. Au passage, la découverte du dictionnaire nous permet de nous rendre compte, grâce aux notices consacrées aux petits villages d’Île-de France, combien la campagne était alors réellement aux portes de Paris.

Œuvre de synthèse et de compilation, les auteurs n’hésitent pas à se lancer souvent dans des digressions érudites, comme par exemple celles rédigées sur les articles du règlement de 1767 des boursiers du collège Louis-le-Grand ou sur les vingt-deux articles de l’arrêt de juillet 1750 qui encadrent l’enseignement de la chirurgie. Particulièrement prolixe sur les monuments, le dictionnaire ne se cantonne pas à présenter une “ville-musée”. Il prend également en compte la multitude des métiers et des artisans dont ils décrivent les techniques en détail. Sont également passés au crible les institutions, les lieux de spectacle, les administrations de la ville et du royaume, les musées et cabinets de curiosités, les écoles et les universités.

Le Dictionnaire historique de la ville de Paris bénéficie de deux belles cartes. La première, intitulée Plan de la ville et fauxbourgs de Paris Avec tous les Changemens et les Edifices les plus récents Pour l’intelligence du Dictionnaire Historique de la Ville de Paris et de ses Environs, n’est pas signée, mais son auteur s’est manifestement inspiré de plans antérieurs comme le fameux plan Turgot établi en 1739. Ce plan prend soin d’indiquer les réalisations marquantes les plus récentes comme la place Louis XV achevée en 1772, ou l’École militaire et le Champ-de-Mars installés sur l’ancienne plaine agricole de Grenelle.

Le second plan, la Carte des environs de Paris d’après les Observations de Mrs de l’Académie royale des sciences, a été réalisé, à une date non précisée, par l’ingénieur-géographe PHÉLIPPEAUX. Il couvre un vaste espace allant de la Ferté-sur-Jouarre et Jouy à l’est, à Chartres, Dreux et Vernon à l’ouest, et d’autre part de Fontainebleau et Étampes au sud, à Chantilly et Senlis au nord. À sa découverte, nous ne manquons pas d’être frappés par le fait que Paris est alors enserré dans un très vaste espace rural, agricole et forestier.

Jusqu’à l’apparition d’autres dictionnaires historiques sur Paris au cours du siècle suivant, comme par exemple le Dictionnaire historique de Paris d’Antoine BÉRAUD et Pierre DUFEY ou le Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments des frères LAZARE, le livre d’HURTAUT et MAGNY constituera l’une des principales références sur le sujet. Il représente toujours de nos jours une mine d’informations précieuse sur le Paris de l’époque où beaucoup de lieux, de rues et de monuments décrits ici ont disparu, emportés par les grands bouleversements de la seconde moitié du XIXe siècle.

Le livre est dédié au duc Jean-Paul-Timoléon de COSSÉ-BRISSAC, gouverneur et lieutenant-général de la ville de Paris.



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