Arabe (langue)

Dictionnaire français-arabe

Auteur(s) : HABEICHE Joseph

 Le Caire, imprimerie du journal Al-Mahroussa
 édition originale
  1890-1891
 2 vol (764 pages environ)
 In-quarto
 demi-chevrette rouge, plats de toile chagrinée rouge, dos orné de motifs, titre et tomaison en lettres dorées
 portrrait du prince héritier Abbas Bey, armoirie


Plus d'informations sur cet ouvrage :

Au début du XIXe siècle, MÉHÉMET ALI, vice-roi de l’Égypte alors placée sous la suzeraineté théorique des Ottomans, entreprend de grandes réformes et de grands chantiers pour moderniser son pays. Pour l’aider dans cette tâche, il fait appel à de nombreux étrangers, avec une préférence marquée pour les Français. C’est dans ce contexte qu’ingénieurs, militaires, hommes d’affaires, religieux et universitaires sont invités à venir exercer leurs talents sur les bords du Nil. Cette politique sera reprise par son successeur, SAÏD Pacha. L’une des conséquences de cette collaboration va être la multiplication d’établissements scolaires francophones, où seront formés nombre de membres de l’élite locale. Avec l’appui du pouvoir, le français devient une véritable langue officielle, utilisée dans l’administration et les échanges internationaux pendant que, parallèlement, se développe une presse francophone. Le creusement du canal de Suez va constituer un point d’orgue dans la collaboration entre l’Égypte et la France. Lorsqu’à partir de 1882 les Britanniques établissent leur protectorat sur le pays, la francophonie est bien implantée dans les classes aisées et chez les serviteurs de l’Ėtat.

Sous-chef du bureau de traduction de l’administration des domaines de l’Ėtat égyptien, Joseph HABEICHE constate, dans l’exercice de ses fonctions, que les membres de l’administration sont en attente d’un lexique français-arabe spécialisé dans les termes techniques. C’est en ces termes qu’il présente la genèse de son projet : “Depuis plus de quinze ans que j’exerce la profession de traducteur, les plus grandes difficultés que j’ai rencontrées ont consisté dans la reproduction de certains termes techniques, très simples en apparence, mais, au fond, impossibles à traduire. Mes recherches dans les dictionnaires existant à ce jour ne m’apprenaient rien ; ces dictionnaires, quoique pour la plupart bien faits, ne reproduisent pourtant pas les termes techniques nécessaires et même indispensables pour rendre une traduction exacte et consciencieuse.”

En 1890, il publie son Dictionnaire français-arabe en deux volumes, qu’il dédie au prince héritier ABBAS Bey. Sorti des presses du journal cairote Al-Mahroussa, ce livre ambitionne, selon l’auteur, d’être “un ouvrage complet, renfermant plus de douze mille mots techniques, de droit, de médecine, d’art et de science, qui ne se trouvent dans aucun autre dictionnaire français-arabe”. Austère dans sa mise en forme, cet ouvrage, dénué de toute vocation littéraire, est avant tout construit comme un lexique pratique et fonctionnel fait de définitions succinctes, HABEICHE privilégiant une précision dénuée de toute ambiguïté. Pour expliquer sa démarche, l’auteur remarque que “quelquefois, dans la traduction arabe, on trouve des mots anglais, français et turcs arabisés, notamment dans les termes techniques de mécanique, d’architecture, de stratégie, de marine, de médecine etc. C’était indispensable car ce sont les termes généralement employés et usités ; si j’en avais employé d’autres, je n’aurais réussi qu’à jeter la confusion dans l’esprit des hommes de science et d’art qui auraient consulté mon dictionnaire“.

Répondant à un besoin réel, ce dictionnaire rencontre un beau succès, en particulier grâce à l’appui du ministère de l’Instruction publique, qui l’adopte pour l’enseignement du français dans ses écoles. Tous les ministères et les administrations de l’Ėtat égyptien sont sommés d’en faire l’acquisition. Ayant fait parvenir son travail à l’Académie des inscriptions et belles-lettres de France, l’Institution adresse ses félicitations officielles à HABEICHE. Rapidement mise en chantier et augmentée “d’un nombre considérable de mots et de termes techniques que les sciences et l’industrie consacrent chaque jour”, une seconde édition sera publiée à Alexandrie en 1896.

HABEICHE mourra à une date inconnue. La francophonie perdurera encore longtemps en Égypte, mais perdra progressivement du terrain face à l’anglais jusqu’à la crise de Suez, qui marquera un tournant en faisant perdre au français le statut privilégié dont il bénéficiait jusque-là auprès du pouvoir et de l’élite égyptiens.



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