Dictionnaire d’hippiatrique et d’équitation
ouvrage où se trouvent toutes les connaissances hippiques
Auteur(s) : CARDINI François-Joseph-Zanobi-Gaétan
Plus d'informations sur cet ouvrage :
François-Joseph-Zanobi-Gaëtan CARDINI naît en 1782 à Florence dans le grand-duché de Toscane, puis il fait carrière en France comme lieutenant de gendarmerie. Naturalisé en janvier 1818, nous retrouvons son nom dans une ordonnance royale de 1842 lui accordant une pension de retraite ; il est alors lieutenant-colonel et dirige la 5elégion de gendarmerie. Après s’être retiré de la vie active, il se consacre à l’écriture, publiant en 1845 la première version d’un Dictionnaire d’hippiatrique et d’équitation.
Le livre rencontre un beau succès d’estime et l’auteur reçoit un courrier du ministre de la Guerre : “J’ai décidé qu’un exemplaire en serait adressé à l’École de cavalerie, à chaque établissement de remonte, ainsi qu’à chacun des corps de troupes à cheval. Vous voudrez bien, en conséquence, faire déposer dans mes bureaux 108 exemplaires du dictionnaire dont il s’agit. “Après deux autres opuscules consacrés à l’Algérie, où il a sans doute servi, CARDINI publie en 1848 une nouvelle version de son dictionnaire. Considérablement augmenté puisqu’il a doublé de volume, il est désormais doté d’illustrations nombreuses et soignées dans la partie consacrée aux races de chevaux. Il s’agit de l’ouvrage ici présenté.
Dans une longue introduction, CARDINI retrace le lien ancien qui lie l’homme au cheval depuis la haute Antiquité. L’auteur remonte à l’histoire de l’Égypte et du Moyen-Orient antique pour dater la domestication des équidés vers le début du second millénaire avant Jésus-Christ, ce en quoi il se trompe, puisque depuis lors ont été découvertes des traces archéologiques attestant qu’elle remonte au moins à 3 500 ans avant notre ère.
Développant l’idée que le cheval est depuis toujours utilisé pour sa force de travail, l’auteur insiste aussi sur son rôle d’assistant de l’homme pour se déplacer et se battre. En effet, jusqu’à la construction de réseaux de chemins de fer, le cheval demeurera le seul véritable moyen de locomotion “terrestre” permettant à l’homme d’effectuer rapidement de longues distances. Mais par ailleurs l’animal constitue aussi une arme de guerre : “Il [l’homme] fut d’abord frappé de l’utilité qu’il devait en retirer, en l’associant à ses paisibles travaux ; et lorsque plus tard les mauvais penchants de notre nature eurent enfanté la guerre, l’homme fit du cheval le compagnon de ses dangers et de ses exploits.”
L’art et les techniques de l’équitation, qu’elles soient à usage civil, sportif ou militaire, constituent le premier sujet abordé par l’auteur. Passant rapidement sur l’Antiquité et le Moyen Âge, CARDINI fait remonter l’histoire de l’équitation moderne et académique aux italiens Federico GRISONE, Cesare FIASCHI, et surtout à Gianbatista PIGNATELLI. L’équitation savante et scientifique se diffusera ensuite dès la Renaissance grâce à des écoles spécialisées. L’auteur n’entend pas présenter un manuel complet d’équitation, mais pour autant il rédige des définitions claires, agrémentées d’anecdotes historiques, de descriptions littéraires et de détails techniques.
L’autre objet central de ce dictionnaire est l’hippiatrie, c’est-à-dire la science vétérinaire consacrée à la santé et aux traitements des pathologies du cheval. Àl’instar de la médecine vétérinaire qui ne s’est dotée d’un corpus scientifique et académique qu’au cours du XVIIIesiècle – l’Ecole nationale vétérinaire d’Alfort ne date que de 1765 -, l’art de soigner les chevaux est longtemps resté imprégné de croyances superstitieuses, de théories erronées et de techniques empiriques souvent inefficaces.
C’est ainsi que nous pouvons lire sous la plume de PLINE, dont les écrits ont très longtemps servi de référence en histoire naturelle : “Un cheval est forcé de suivre les traces d’un loup mort, et si le cavalier le contraint à suivre celles d’un loup vivant, ses pieds tombent en paralysie ; la farine d’ivraie combat la goutte des chevaux ; la poudre de guimauve les guérit de la rétention d’urine ; la poudre de fougère détermine la cicatrisation des ulcères du garrot ; on combat les tranchée, en prenant un pigeon ramier et en lui faisant faire trois tours près des organes sexuels de l’animal malade, lequel guérit immédiatement, et le ramier meurt, quand bien même on lui rendrait la liberté.”Il faut attendre le livre de Carlo RUINI en 1598 pour disposer du premier véritable manuel scientifique décrivant l’anatomie du cheval. Par la suite, des auteurs comme Jacques de SOLLEYSEL, Philippe-Étienne LAFOSSE et Claude BOURGELAT achèveront de donner ses lettres de noblesse à l’hippiatrie française.
Le Dictionnaire de CARDINI est unanimement salué comme un ouvrage de vulgarisation permettant de faire le point sur les grandes avancées et les découvertes récentes dans le domaine de l’hippiatrie. Le Recueil de médecine vétérinaire, revue publiée par les professeurs de l’Ecole d’Alfort, a ainsi salué la parution de la première édition en 1845 : “Le nouveau Dictionnaire d’hippiatrique de Cardini est un livre sérieux, fait avec conscience et talent, tout à fait à la hauteur de nos connaissances actuelles, suffisamment développé pour donner une idée exacte et vraie des matières qu’il traite, aux hommes qui doivent s’intéresser par profession à la connaissance du cheval, et circonscrit toutefois dans des limites assez restreintes pour se maintenir à la portée des intelligences qui ne sont pas initiées par des études spéciales aux secrets de la science… Les matériaux de son livre sont principalement empruntés aux travaux des vétérinaires. Il en a présenté le résumé avec beaucoup d’ordre et de clarté, et avec une érudition qui témoigne des études véritables auxquelles il a dû se livrer avant de publier un pareil travail.”
Certains articles consacrés aux blessures, maladies et autres pathologies, comme la tympanite, la morve, les hernies, le farcin ou le charbon, sont particulièrement développés et détaillés. L’auteur cherche à permettre la pose d’un diagnostic, tout en préconisant des remèdes et des gestes de premier secours dans l’attente du vétérinaire. Bien que dépassé par la multiplication de manuels et de dictionnaires spécialisés, le Dictionnaire de CARDINI, sorte d’encyclopédie pratique du cheval, restera longtemps un ouvrage de référence, en particulier dans les institutions militaires.
Extraits
Abandonner un cheval: C’est lui lâcher complètement les rênes, dans le but de le faire courir de toute sa vitesse. Cet abandon est mauvais, soit qu’il s’agisse d’un cheval ardent, soit que l’on ait affaire à un cheval froid. Dans le premier cas, il y a danger à se livrer ainsi de confiance à la fougue et aux caprices de l’animal ; dans le second, il faut nécessairement entretenir ses forces, ce qu’on ne peut faire qu’en le soutenant de la main et des jambes. En toutes circonstances, il peut en résulter une foule d’inconvénients. Le cheval abandonné à lui-même peut se livrer à tous les égarements de sa fougue, exposer les jours du cavalier, des passants et les siens. Il n’est pas
moins dangereux d’abandonner un cheval de trait. Les chevaux eux-mêmes, venant à tomber, peuvent se couronner, et même se tuer.
Ivraie enivrante: en lat. lolium temulentum. La graine de cette plante, qu’il ne faut pas confondre avec celle de l’ivraie vivace, exerce sur le cheval une action narcotique et délétère des plus marquées. Les maquignons s’en servent pour engourdir les chevaux, et surtout les mulets méchants, avant de les mettre en vente. En 1342, dans un village près de Zurich, un cheval ayant mangé une grande quantité d’ivraie, qui se trouvait mêlée avec son avoine, tomba dans une espèce de léthargie. Son maître, qui le crut mort, le fit transporter hors du village et écorcher. Peu après cette opération, le cheval se réveilla de son assoupissement, retourna à la maison de son maître, et causa la plus grande surprise à ceux qui le virent.
Trot: Le cheval en liberté use peu de cette allure ; elle ne lui sert qu’à passer du pas au galop, ou du galop au pas et au repos. Cependant nos habitudes et nos besoins nous font rechercher cette allure, que l’on s’attache à rendre facile aux jeunes chevaux ; et l’on choisit de préférence pour la reproduction les animaux qui la marquent le mieux… Certaines personnes croient, mais c’est à tort, que le trot se développera mieux en ne donnant aucun appui sur le mors ; le cheval, alors poussé en avant sans être maintenu, n’osant se livrer, trottera avec une incertitude qui communiquera de l’inégalité au mouvement de ses jambes, ce qui pourra lui faire prendre le galop ou une allure fausse.