Médecine

Dictionnaire des Pronostics, ou l’art de prévoir les bons ou mauvais événemens dans les maladies

Auteur(s) : TISSOT Samuel Auguste André David

 à Paris, chez VINCENT, imprimeur-libraire, rue S. Séverin
 édition originale
  1770
 1 vol (XI-372 p.)
 In-douze
 veau, dos lisse avec caissons ornés de motifs floraux dorés
 bandeaux décoratifs, lettrines ornées, culs-de-lampe


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La médecine, libérée de son pesant héritage classique, connaît de grandes avancées au cours des XVIIe et XVIIIe siècles. Elle devient une science véritablement moderne, même s’il faut attendre le siècle suivant pour voir s’accomplir les progrès les plus décisifs. Discipline longtemps réservée à une élite capable de déchiffrer le latin et le grec, la médecine se vulgarise peu à peu, en particulier grâce à l’essor des livres imprimés. Des manuels, et surtout des dictionnaires portatifs écrits en français, se multiplient et, pour satisfaire une forte demande, s’adaptent à différents types de publics, étant diffusés à grande échelle, aussi bien dans les villes que dans les campagnes.

Après ses études de médecine à Genève et à Montpellier, Samuel Auguste André David TISSOT vient s’installer à Lausanne. Il se distingue en traitant efficacement des cas de petite vérole et en faisant la promotion de l’inoculation. Il publie en 1758 un remarqué Dissertatio de febribus biliosis, grâce auquel il se fait un nom dans la profession. Mais le titre qui va le rendre définitivement célèbre sera son Testamen de morbis manustrupatione. Ce livre sera traduit en français en 1760, sous le titre de L’Onanisme, ou Dissertation physique sur les maladies produites par la masturbation. Pour lui, l’abus des “plaisirs de l’amour” est déjà très dommageable pour la santé mais, à ses yeux, le plaisir solitaire est encore plus dangereux car il “épuise les forces et tarit les humeurs, assèche le corps et l’âme”. Notre brave praticien helvète promet bien des malheurs à ceux qui pratiquent la “souillure manuelle”, qui entraînerait, entre autres, la perte de la vision et de l’ouïe, l’impuissance à accomplir le devoir conjugal, voire même la folie. L’ouvrage connaîtra un très grand succès et, réédité jusqu’au XXe siècle, il garnira les bibliothèques bien pensantes pendant de longues années. Bien qu’il se pose plus en médecin et en hygiéniste qu’en moraliste, et n’évoque guère la notion de péché, TISSOT apporte des justifications “scientifiques” au cadre moral répressif et teinté d’hypocrisie qui va régner sur la sexualité dans la bonne société bourgeoise. Soulignons au passage que ces préjugés engendreront des pratiques préventives et curatives pour le moins contraignantes, parfois farfelues, voire  éventuellement dangereuses.

Pour autant, TISSOT reste préoccupé par le souci de vulgariser la médecine et de procurer au plus grand nombre un outil pratique pour soigner les maux quotidiens. Récusant à la fois la médecine savante, stricte et élitiste, et la médecine dite populaire, entachée de superstitions, en 1761 il fait la promotion, dans son Avis au peuple sur sa santé, de ce qu’on appellerait aujourd’hui la médecine naturelle. Ce livre aura également un grand succès, avec près de 18 éditions qui s’échelonneront jusqu’en 1792.

Célébré dans toute l’Europe, TISSOT multiplie les publications, tantôt savantes, tantôt de vulgarisation. C’est ainsi que nous avons trouvé dans sa longue bibliographie un Dictionnaire des pronostics, que nous vous présentons ici. Ce livre, publié à Paris en 1770, s’inscrit dans la longue liste des ouvrages pratiques destinés aux personnes qui souhaiteraient soigner certains maux faciles à guérir, ou pratiquer ce qu’on pourrait appeler les premiers soins ou les premiers secours. Faisant sienne la maxime de Nicolas-Gabriel CLERC, il professe que  “l’observation est le premier pas vers l’expérience : celle-ci est la base des connoissances certaines, & le fondement de tous les succès en médecine”. Ayant consigné des notes de lecture et ses propres observations au cours de ses années d’étude et de pratique, il s’est constitué un recueil pour son usage personnel, dont il livre ici une version abrégée. Celle-ci contient assez peu d’entrées, chacune d’elle étant par contre très développée.

Contrairement à ce que laisserait supposer le titre, TISSOT ne se limite pas au pronostic, soit l’art de juger de l’évolution de l’état du patient et de ses chances de guérison ; il précise également les symptômes susceptibles de guider l’indispensable diagnostic préalable. Sans s’arrêter aux seules manifestations physiologiques, il prend en compte les troubles du comportement, du sommeil et même les problèmes psychologiques. Médecin très attentif aux progrès accomplis, il demeure très attaché aux maîtres antiques, comme HIPPOCRATE qu’il cite très souvent, et donc à la théorie des humeurs, qui le guide en permanence dans ses analyses.

Répondant à la demande de l’empereur JOSEPH II, TISSOT enseignera ensuite à Pavie, où il aura l’occasion de faire la démonstration de ses talents au cours d’une épidémie. Au bout de trois ans, il regagnera Lausanne où, en mai 1797, il s’éteindra suite à une tuberculose.



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