Curiositez françoises pour supplément aux dictionnaires
ou Recueil de plusieurs belles propriétés, avec une infinité de proverbes & de quolibets, pour l'explication de toutes sortes de livres
Auteur(s) : OUDIN Antoine
Plus d'informations sur cet ouvrage :
Antoine OUDIN, fils aîné de César OUDIN, dont il prend la suite comme « secrétaire interprette de sa majesté », se fait connaître par son travail sur les langues italiennes et espagnoles, poursuivant ainsi l’œuvre commencée par son père. La langue française est au centre de ses préoccupations orientées en particulier sur son enseignement aux étrangers.
C’est ainsi qu’en 1640 il publie les Curiositez françoises. Il s’agit d’un recueil de proverbes, expressions, locutions et métaphores, destiné à un public lettré maîtrisant déjà bien le français. OUDIN précise d’emblée : « Le seul but où je vise, & que j’estime assez raisonnable, est de purger les erreurs qui se sont glissées dans la plupart des pièces que l’on a mises en lumières pour l’instruction des estrangers. » Il relève en particulier « nombre d’antiquailles » et de contresens qui truffent certains ouvrages modernes. En 1656, plusieurs années après le décès de l’auteur, une deuxième édition des Curiositez est publiée avec un texte identique, mais assortie de variantes dans la typographie, la mise en page et les illustrations ; il s’agit de la version présentée ici. À la suite du dictionnaire, une addition propose une seconde série d’expressions.
Paradoxalement, s’il entend, comme il le précise dans sa préface, faire la promotion du “bon” langage, il ne se prive pas d’intégrer dans ce recueil des expressions populaires “vulgaires” ou du moins assez triviales voire argotiques, indiquées par vulg. De même il fait précéder d’une étoile les « phrases dont on se doive servir qu’en raillant”. Remarquons que, dans les faits, ces distinctions ne sont pas toujours très rigoureusement respectées selon les articles.
Si une grande partie des expressions se sont maintenues dans le langage courant jusqu’à nos jours, telles “Prêter main forte”, “C’est une autre paire de manches“, ou “C’est bonnet blanc et blanc bonnet”, beaucoup d’autres sont tombées en désuétude. Ces proverbes, métaphores et locutions disparus sont souvent assez savoureuses et très imagées, donnant une vision truculente de la société de l’époque : « Elle a le ventre relevé en bosse” (elle est enceinte), “Le pays de Clacquedent” (lieu où l’on tremble de froid), “Il joue de l’épée à deux jambes” (il s’enfuit), “Envoyer en Cornouaille” (rendre un homme cocu),”La face du Grand Turc” (le cul), “Avoir le mal de la corde” (être pendu), etc.
Une dédicace au comte Georges Frederick de Waldeck est placée en début d’ouvrage.
Quelques expressions tirées du dictionnaire
*Vous aurez beau veau, vous ahannez bien : vous vous plaignez beaucoup en travaillant.
*Faire un boudin : marier un homme noble avec une riche roturière, l’homme fournit le sang et la femme la graisse, c’est-à-dire l’argent.
*Vous me prenez pour un Allemand : vous me prenez pour un ignorant.
*Se lever matin pour baiser le cul à Martin de peur qu’il n’y ait presse : raillerie que l’on dit à ceux qui parlent de se lever de bonne heure.
*Mesurer le saut des puces / S’aller frotter le cul au panicaut : perdre son temps.
*Cette paire de bas est de deux paroisses : de deux couleurs.
*Emprunter un pain sur la fournée : coucher avec une fille avant de l’avoir épousée.
*Proche de l’église, loin de Dieu : négliger ce qui est commun, familier.
*En papagosse, où les chiens chient de la poix : en un lieu inconnu.
Depuis toujours, le sexe est une source d’inspiration inépuisable dans le domaine du langage. Les expressions suivantes ont toutes pour définition : “Faire l’acte vénérien”.
*Rembourrer le bas / Jouer aux dames rabattues / Jouer des orgues / Faire compter les solives à une femme / Faire la cricon criquette / La paix de la maison / Frotter son lard / etc.