Le développement de l’imprimerie ayant généralisé la production des livres en série, un des soucis des “imprimeurs-éditeurs” consiste à authentifier et à personnaliser leur production.
Ces marques, qu’avec anachronisme nous pourrions appeler “ces logos”, sont sobres, discrètes et souvent représentées sous la forme d’un simple motif ornemental, d’un blason, d’un monogramme ou d’une composition florale. La place prise sur les pages de titre par les interminables titres à rallonge explique sans doute ce minimalisme contraint !
Exception faite de mauvaises imitations ou des contrefaçons, les marques constituent la plupart du temps de belles gravures, mises en valeur sur la page de titre, et parfois même reproduites à l’intérieur du livre. Elles sont souvent très travaillées, présentant, selon les cas, une allégorie, une charade, une énigme ésotérique ou un jeu de mots. Dans un prochain billet, nous nous attarderons sur certains exemples remarquables.
Quand les publications bénéficient du patronage d’une autorité prestigieuse, l’imprimeur fait en sorte que sa marque officialise le privilège de manière ostentatoire.
S’il ne veut pas recourir à une allégorie trop abstraite, l’éditeur-imprimeur peut faire référence à son nom ou à son prénom. Nous proposons ci dessous deux exemples. À droite, l’imprimeur CRATO, de son vrai nom KRAFT, est représenté par une gravure de SAMSON terrassant le lion. Cette scène illustre le mot “force“, traduction littérale de son nom en allemand et en grec (crato étant la forme latinisée du grec kratos). À gauche, Félix FAULCON est, plus simplement, représenté par… un faucon !
Nombre d’éditeurs-imprimeurs choisissent d’illustrer leur enseigne, leur adresse, le nom de leur bâtiment ou de leur rue en les figurant de manière allégorique. Nous présentons, ci-dessous à gauche, la marque d’un imprimeur lyonnais qui, ayant “À l’Occasion” comme enseigne, a choisi, pour illustrer sa marque, la divinité Occasion, soit une jeune fille nue aux pieds ailés qui s’enfuit sur une roue. Suivent, de gauche à droite, “la Palme”, “aux Trois mores”, et “à l’Enseigne de la vérité”, laquelle prend les traits étranges d’une jeune fille juchée sur le dos d’un guerrier plongeant un poignard dans la gorge de sa monture.
Pour le plaisir des yeux, voici encore quelques enseignes : “à l’Aigle”, “au Mercure ailé”, “à la Bible d’or”.
Les marques d’éditeur ne disparaissent pas aux XIXe et XXe siècles, mais elles tendent à se faire plus discrètes et moins fantaisistes, le monogramme ou le sigle devenant la norme.
A contrario, avec le développement des modes d’impression modernes, l’illustration s’étend de plus en plus souvent à l’ensemble des dictionnaires et des encyclopédies, sous la forme de frontispices, de planches hors texte, de vignettes dans le texte, de cartes, etc.
Pour conclure, témoignons une nouvelle fois notre admiration au très beau “logotype” des éditions Larousse, créé par Eugène GRASSET à la demande de Claude AUGÉ, et devenu par la suite l’emblème universel de la maison d’édition, assorti de la célèbre devise : « Je sème à tout vent. »
Dans les années 2000, les éditions Larousse feront appel à Christian LACROIX, à MOEBIUS, puis à Karl LAGERFELD pour revisiter le fameux logo de la Semeuse.
PS : Pour ceux qui veulent aller plus loin, nous les orientons vers deux articles consacrés à ce sujet, le premier sur le site Bibliomab et le second sur le site de l’ENSSIB.
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