Si le but de cette nouvelle collection est clairement défini par son concepteur – “C’est la rencontre idéale entre un auteur ou une personnalité et son sujet. Mais cela ne suffit pas. Que l’auteur s’implique, voilà mon secret de fabrication” -, reste encore à recruter les candidats “adéquats”. SIMOEN, qui par son entregent n’a que l’embarras du choix, met à profit sa longue expérience d’éditeur et d’écrivain pour tenter de trouver à chaque fois la combinaison gagnante entre notoriété, expertise, qualité d’écriture et talent de conteur. Pour la plupart des auteurs, dont la compétence et le lien avec le sujet ne font aucun doute, le choix semble s’imposer d’emblée. Il en est ainsi de Jean-Claude CARRIÈRE et l’Inde, de l’Égypte traitée par Robert SOLÉ, du rugby et de l’ovalie vus par Daniel HERRERO, de MOZART par Ève RUGGERI, de la psychanalyse par Élisabeth ROUDINESCO, de MOLIÈRE par Francis HUSTER, du rock par Antoine de CAUNES, du Tour de France par Christian LABORDE, des jardins et des arbres par Alain BARATON, ou des langues par Claude HAGÈGE ; sans oublier bien sûr notre préféré, le tome consacré aux dictionnaires, dont la rédaction a été judicieusement confiée à Alain REY.
Ci-dessous, nous vous présentons quelques titres d’une collection qui, dans un format commode et dotée d’une couverture jaune facilement reconnaissable, est devenue emblématique dans le monde de l’édition.
Autre thématique pour le moins singulière, le Dictionnaire amoureux des menus plaisirs est signé par Alain SCHIFFRES, qui avec une bonne dose d’humour nous dévoile quelques-unes des petites satisfactions quotidiennes qui émaillent de manière quasi inaperçue l’existence de l’Homo sapiens. Le livre n’ayant pas rencontré le succès escompté, par la suite l’éditeur en remaniera le titre – le premier ayant sous doute prêté à confusion –, qui deviendra en 2011 : le Dictionnaire amoureux du bonheur. Enfin, Metin ARDITI , Suisse d’origine turque, s’est penché sur un vaste sujet, l’esprit français, tandis que François ROLLIN s’est attaqué à l’insondable et inépuisable thème de la bêtise.
Si l’exercice, pour être productif et réussi, passe nécessairement par une très large liberté laissée à l’auteur, l’éditeur joue quand même son rôle selon le vieil adage “la confiance n’exclut pas le contrôle“. Deux seules obligations sont imposées aux rédacteurs. D’une part, il doit s’agir d’une œuvre personnelle, entièrement sortie de leur propre plume, donc originale par définition. Ensuite, il est nécessaire, par respect pour un lecteur qui ne veut pas s’aventurer dans une démonstration scolaire, de lui proposer un texte clair et fluide susceptible de générer une certaine complicité entre l’écrivain et son invité. C’est ainsi que SIMOEN incitera Jacques ATTALI, qui lui remettait un véritable “pensum”, à revoir sa copie en lui disant sans détour : “Je veux ton rapport personnel au judaïsme, tes premières lectures, tes coups de cœur, ton histoire, tes souvenirs. Une encyclopédie de plus, ça ne m’intéresse pas.” Pour l’éditeur, chacun de ses auteurs “a le devoir d’élever le débat en portant son érudition au plus grand nombre”. L’éditeur l’avoue d’ailleurs sans fard : il veut des “livres faits pour durer […] qu’on laisse sur sa table de chevet et que l’on picore”. La plupart du temps les auteurs volontaires, lors de cette expérience d’écriture atypique, ont écrit leur ouvrage “dans le désordre”. C’est généralement plongés dans un inventaire personnel et même intime, proche par certains côtés d’un cabinet de curiosités, qu’ils développent une arborescence improbable bâtie par associations d’idées et ricochets, cette errance volontaire les dissuadant de toute tentative de planification rigoureuse préalable, car, comme le souligne l’éditeur : “Le dictionnaire amoureux, c’est en fait le contraire d’un dictionnaire parce qu’il est imprévisible !”
Après plus de vingt années à la barre de son navire, pendant lesquelles ont été publiés près de 150 titres cumulant 2 millions d’exemplaires vendus, dont certains récompensés, SIMOEN a passé la main en février 2020 à Grégory BERTHIER-SAUDRAIS, directeur éditorial de Plon depuis 2020, lequel a pris en main les destinées de la collection. D’autres tomes sont sortis depuis ce passage de témoin – consacrés à Istanbul, à la Corse, à l’Ukraine et la Coupe du monde de football – et ces dictionnaires pas comme les autres, à l’image des passions humaines sans cesse renouvelées, semblent avoir de beaux jours devant eux. Ci-dessous, nous vous proposons un entretien de novembre 2021 dans lequel intervient SIMOEN avec Richard COLLASSE, à l’occasion de la sortie du Dictionnaire amoureux du Japon. Vous pouvez également lire cet article publié dans la Voix du Nord en 2019, dans lequel notre éditeur est joliment décrit comme un “confesseur d’auteurs”.