Petit dictionnaire de nos grandes girouettes-1842
d'après elles-mêmes. Biographies politiques contemporaines.
Auteur(s) : GALLOIS Léonard Joseph Urbain Napoléon
Plus d'informations sur cet ouvrage :
Napoléon GALLOIS, fils du journaliste et historien de la Révolution et de l’Empire Charles André Gustave Léonard GALLOIS, hérite des fortes convictions républicaines de son père. C’est ainsi qu’il participe à des sociétés secrètes comme la Société des droits de l’homme et la Nouvelle société des saisons, avant d’être initié à la franc-maçonnerie. Il collabore successivement à plusieurs journaux à Paris avant de s’installer au Mans où il devient, en 1845, le rédacteur en chef du Courrier de la Sarthe.
C’est donc en républicain engagé qu’il se penche sur la vie politique particulièrement agitée de son temps. En cinquante ans, la France a connu la fin de l’Ancien Régime, la Révolution, le Consulat, l’Empire, une première et brève Restauration, un éphémère retour de l’Empire, le retour de la monarchie des Bourbons, l’insurrection victorieuse de 1830 et enfin l’établissement d’une monarchie de Juillet, émaillée de nombreux soubresauts révolutionnaires ponctuels. Ces nombreux et rapides changements de régimes ont vu se multiplier les allégeances opportunistes, les retournements d’alliances et les trahisons.
La fidélité très “élastique” et la rouerie notoire de nombreux politiques, fonctionnaires, notables et artistes sont depuis longtemps la cible de la verve des chansonniers, des caricaturistes et d’une littérature satirique qui dénoncent ces “girouettes” s’orientant dans le sens du vent porteur du moment. On peut citer le fameux Dictionnaire des girouettes, publié en 1815 après les Cent-Jours, le Petit dictionnaire des girouettes de 1826 écrit par « une société d’immobiles », ou encore le Nouveau dictionnaire des girouettes de 1836 rédigé par « une girouette inamovible ». Prenant ces ouvrages pour modèle, GALLOIS entend dresser le portrait peu flatteur de certains de ses contemporains. L’ouvrage ici présenté, Le petit dictionnaire des grandes girouettes, est publié en 1842 sans que, par prudence, il prenne le risque d’apposer son nom sur l’ouvrage.
Le ton général se veut railleur et ironique : « À nous de les placer face à face avec l’opinion publique, leurs discours à la bouche, leurs actes écrits sur le front ; à l’opinion de voir si elle doit rire des unes et réprouver les autres. » Mais GALLOIS ne cache pas le dégoût que lui inspirent au final la versatilité, la servilité et la cupidité de ces girouettes : « C’est que le cynisme de l’apostasie marche aujourd’hui le front levé, oubliant que la conscience est de tous les temps parce qu’il n’a plus de conscience. » Une des grandes sources dans lesquelles il puise est le Moniteur universel, dans lequel, raconte l’auteur, « il nous a fallu fouiller feuille par feuille, discours par discours ». Ce journal, fondé par PANCKOUCKE en 1789, est devenu, au cours des années, l’organe officiel du gouvernement, au point d’obtenir, à partir de 1834, l’autorisation de retranscrire dans ses colonnes les débats parlementaires.
GALLOIS se défend de tout parti-pris, écrivant notamment que « nos appréciations toutes politiques ne dépassent pas le seuil de la vie privé »,” mais il reconnaît néanmoins avoir épargné ceux qui se sont rapprochés des idéaux républicains : « Il est des hommes qui ont progressé avec le siècle, qui sont peu à peu venus dans le camps des amis de la liberté. Devions-nous leur rappeler un passé qu’ils ont racheté par un dévouement désintéressé à la cause populaire ? Nous ne l’avons pas cru. »
Il s’agit bien d’un ouvrage politiquement marqué, clairement situé dans l’opposition antimonarchique et engagé dans la défense des idées socialistes. Certaines notices sont clairement rédigées à charge, comme par exemple celle concernant François GUIZOT, membre éminent du gouvernement de LOUIS-PHILIPPE et alors ministre des affaires étrangères. Ne sont pas épargnés Casimir PERSIL, directeur de la Monnaie et pair de France, aujourd’hui oublié, dont GALLOIS fait un archétype du haut fonctionnaire cynique et opportuniste, ou encore le maréchal MARMONT, ancien général de l’Empire, rallié à CHARLES X, vilipendé pour sa trahison envers NAPOLÉON en 1814 et son rôle dans la répression des Trois Glorieuses.
À la suite du nom du personnage décrit, GALLOIS place, à l’instar du Dictionnaire des girouettes de 1815, un ou plusieurs petits fanions selon le nombre de changements de camp et de trahisons qu’il leur attribue. Victor HUGO et le comte MOLÉ en ont ainsi quatre, Adolphe (curieusement prénommé ici Auguste) THIERS et CHATEAUBRIAND cinq, DECAZES huit, GUIZOT douze, et l’obscur DEUTZ dix-sept.